C’est un reproche que l’on fait souvent à la droite, son absence de sensibilité en matière d’art. Il est même facile de faire passer les gens de droite pour des gens sans finesse d’esprit, un peu patauds, pas assez instruits pour entrer dans les arcanes de l’art contemporain.
Et c’est vrai, je le prends même personnellement, je suis effectivement moi même très obtus en la matière. L’abstraction ne me parle pas et je choisis toujours des représentations figuratives très classicistes pour illustrer mes propos. Mais d’un autre coté, je suis un identitaire. Ma sensibilité est du coté du rejet de la transformation, et l’amour de l’essence, alors comment pourrais-je promouvoir un art qui soit abstrait. Ce qui me touche dans un tableau, dans une sculpture, c’est l’immuabilité du corps justement. Ma frontière est l’impressionnisme qui suggère la forme, et lui assigne des émotions par le jeu de couleurs souvent pâles. Mais la forme continue d’exister, elle n’est pas distordue, elle n’est pas niée. Il ne reste au contraire que la forme, épurée de tout ce qui n’était pas nécessaire.
Nous nous nommons identitaires, mais nous savons aussi que l’identité n’est pas l’identité. Comme le souligne Renaud Camus en reprenant Heidegger dans La Dépossession, l’entité n’est pas l’identité. L’identité est uniquement la sécrétion de l’entité. Le corps est immuable et va modeler des identités multiples au fil des siècles pour s’adapter à son environnement et aux circonstances. C’est parce que nous avons le corps, c’est parce que nous retournons au corps, que nous sommes capables d’aboutir à une nouvelle identité plus à même de relever les défis modernes. Si jamais notre vision esthétique est la déformation et l’abstraction du corps, alors qu’est ce que cela veut dire de notre identité.
Pour les gens de gauche, la forme doit être dépassée, elle doit devenir abstraite, pour que puissent s’émanciper et régner les idées. Mais pour les gens de droite, la forme est le fond. L’art est l’identité, et l’identité est le corps. Le corps est le creuset de toutes les possibilités et l’art classique nous touche parce qu’il est notre matrice originelle et pure. Nous ne sommes qu’une possibilité, une branche de l’arbre, une déclinaison de cette forme originelle. Et c’est ce qui nous rend forts, capables de nous adapter. Nous ne devrions jamais rompre ce lien pour nous adonner à la folie des idées. Si l’Occident est un arbre, à tout moment, nous devons pouvoir remonter dans l’embranchement de nos idées, et redescendre pour donner de nouveaux fruits. Nous avons cette matrice originelle en nous, recouverte par le simple voile de l’identité. C’est justement parce que je suis contre toute transformation du corps par idéologie, que je suis sensible à un art figuratif très rigide. Et inversement. C’est cette infinité de possibilités que m’offre le corps européen qui me fascine. L’Occident est un arbre qui continue d’exister en nous et de rester un sanctuaire tant que nous n’altérons pas notre propre corps.
Dans la multitude d’idées qui nous possèdent et nous font diverger parfois très violemment, comment recréer du commun et de l’identité, si nous ne revenons pas plus à la racine de cet arbre ? Et le travail de Charbonnel, à cet égard, est incroyable.
Entrepreneur, ingénieur spécialisé dans les technologies d’Intelligence Artificielle.